La franchise phare de Capcom en matière d'horreur revient avec un septième épisode, cette fois en vue à la première personne. Un changement de perspective, et un renouveau pour la saga. Du moins, c'était le plan initial. Le premier jeu FPS de la franchise tient-elle son pari ? Pour le savoir, plus qu'à lire ce test de Resident Evil 7.
De quoi ça parle, Resident Evil 7 / biohazard ?
Ethan Winters était heureux, avec sa femme Mia. Pourtant, celle-ci a dû partir brusquement, et n'a plus donné de nouvelles depuis 3 ans. Bien en délicatesse depuis tout ce temps pour déclarer ses impôts, notre héros est soulagé lorsqu'il reçoit un message de sa dulcinée.
Celle-ci l'invite à se rendre dans le fin fond de la Louisiane, à Dulvier. Alors que les alentours sont entièrement déserts, Ethan entre dans la maison apparemment vide de la famille Baker. Les photos montrent une famille plus ou moins normale qui vivrait dans ces lieux.
Quel changement drastique avec les psychopathes qu'Ethan rencontre, une fois qu'il devient leur captif. Il va assister à la pire émission d'un Dîner Presque Parfait, et à une nuit très longue. Voire mortelle.
Conditions de test
Resident Evil 7 a été testé depuis une version commerciale Playstation 4. Joué sur la console next-gen de Sony grâce à la mise à niveau gratuite, ses paramètres ont été placés sur Performances. L'avantage ? Le 60 FPS, et des graphismes quand même très satisfaisants.
Après le déclin, le renouveau de Resident Evil avec son septième épisode
La série Resident Evil est vieille ; cela peut choquer pour qui, comme le rédacteur de ces lignes, a vu l'émergence du premier épisode sur PS One à l'époque. Pourtant, elle fait aujourd'hui figure de vétéran de l'horreur dans une industrie qui a connu bien d'autres jeux depuis.
Et ce ne fut pas un chemin très facile. Si, globalement, les 4 premiers épisodes sont reconnus comme des valeurs sûres, à des degrés divers, la franchise de Capcom a touché le fond avec les cinquième et sixième épisodes canon. Non pas qu'ils fussent tout à fait mauvais ; le 5 avait ses qualités, le 6 un quart sympathique, mais le mode coopération ne pouvait seul sauver la réputation de la série de plonger.
Une vaste réflexion a été entamée par Capcom pour réhabiliter la série, et l'adapter aux attentes modernes. Comment reproduire la terreur de Resident Evil premier du nom à l'heure du streaming tous azimuts ?
La réponse : s'inspirer de ce qui fait peur au cinéma, et dans les jeux vidéo. Au revoir vue à la troisième personne historique ; bienvenue à l'immersion, en incarnant complètement Ethan Winters, le héros inédit de cette aventure. Preuve de cette volonté de revenir aux sources : l'adoption du nom originel, biohazard, pour cette nouvelle vision de l'effroi selon Capcom.
Un renouveau attendu au tournant, qui marque également l'apparition du moteur maison : le RE Engine. Pari réussi pour Resident Evil 7 ? C'est qu'est-ce qu'on va voir.
Brio bazar : des influences assimilées pour un second souffle contaminé
Paradoxalement, plus le zombie devenait prégnant dans la pop-culture, davantage Capcom s'en éloignait pour ses Resident Evil. Le phénomène a commencé avec Resident Evil 4, et s'est poursuivi par la suite.
De fait, la licence horrifique n'a pas surfé sur la vague des pairs de 28 jours plus tard, Walking Dead et autres Shaun of the Dead. En lieu et place, elle a accouché de monstres aux esthétiques, hum, particulières. Mais généralement avec des yeux ou boules rouges sur lesquelles tirer, très influencés par Lost Planet.
Vous attendiez le retour des zombies pour le septième épisode ? Votre heure n'est pas revenue. La famille Baker et sa maison abritent bien des curiosités, mais jamais les ennemis historiques. Cela a quelques avantages.
Tout d'abord, l'ambiance poisseuse et la folie des antagonistes rappelleront de bons souvenirs aux amateurs de Massacre à la Tronçonneuse et autres le Crocodile de la Mort. L'œuvre de Tobe Hopper semble ici être la référence, après celle de Georges Romero.
De plus, l'impression, pendant une longue partie du jeu, de ne pas être en terrain connu provoque une lourde angoisse. À ce titre, les premiers moments sont véritablement captivants, stressants, et admirables en maîtrise de la tension. Jusqu'à ce qu'on se rende compte qu'il s'agit, avant tout, d'un jeu vidéo.
Une aventure inégale sur le territoire Baker et au-delà
Sans trop en dévoiler, la quête pour retrouver Mia Winters, la femme de notre personnage, confrontera Ethan à une première rencontre sanglante et mémorable avec ses hôtes : la famille Baker. Quatre protagonistes, et surtout le père, la mère, et le frère qui attestent d'une folie pour le moins expansive.
Chacun constitue un boss, à travers une zone lui étant spécifique dans le jeu. Dans cette perspective, la découverte de la maison Baker et ses sous-sols fera figure de valeur-étalon pour évaluer le reste du jeu. Jack Baker est particulièrement charismatique, et chacune des oppositions impressionne durablement.
Malheureusement, très rapidement, le jeu se sent obligé de combler les moments de tension par d'autres monstres. Des espèces de créatures boueuses, qui, si elles peuvent surprendre au début, deviennent trop redondantes au fil du jeu. Elles constituent la principale menace "routinière" du jeu.
Quel dommage que cette dimension de cache-cache, intronisée au début du jeu, et inspirée par les pairs d'Outlast ou Amnesia, ne soit pas uniquement conservée par la suite. Tout au long du jeu, ce regret perdurera, compte tenu des autres arcs qui suivent.
Atmosphère ? J'ai pas une gueule d'atmosphère !
Resident Evil 7 profite de la première apparition du moteur RE Engine. Grâce à celui-ci, les environnements sont tous très beaux, et peuvent être analysés de près sans révéler de défauts. Toute l'atmosphère profite de l'expérience de Capcom en la matière. Les bruits de craquements de bois, du vent, immergeront le joueur dans une ambiance très lourde dès le début du jeu. Une grande réussite de ce point de vue-là.
Faire la paix avec la mort, c'est porter le deuil de la peur
Comme tout jeu de la licence, le début de biohazard accouche de moments mémorables. Cette ambiance crasseuse et crispante se délite trop vite, à la faveur de divers facteurs.
En premier lieu, les combats de boss sont extrêmement crispants. Lors d'un premier run, il ne sera pas rare de perdre à répétition sur des difficultés incongrues. Les frames d'attaque et de défense sont parfois confuses, provoquant deux sentiments :
- de la frustration ;
- la perte de la peur et de l'angoisse.
Finalement, si mourir et recommencer est si simple et anodin, pourquoi en avoir peur ? Si le jeu se veut un die and retry à certains moments, le reste du titre ne peut-il se vivre ainsi ? Par conséquent, le joueur pourra aborder chaque passage futur du jeu l'esprit tranquille, en dépit des nombreuses menaces planant au-dessus de lui.
Et ces menaces, Resident Evil 7 lui donne tout lieu de les annihiler. En mode normal, le joueur un peu averti aura tendance à économiser ses munitions et viser l'efficacité. Las ; dans le dernier arc du jeu, il se sera constitué un arsenal parfait pour envahir la Louisiane dans son ensemble.
Le monstre de Frankenstein du jeu vidéo : Resident Evil 7 ou Biohazard ?
Outre cela, Resident Evil 7 fait, dans l'ensemble, l'impression d'un patchwork d'idées mal ajusté au sein d'un même jeu. Chaque membre de la famille Baker induit une variation de gameplay, ou de l'idée même de l'horreur. L'exploration avec Jack ; la fuite en avant avec Marguerite, la mère ; le concept d'épreuves à la Saw avec Lucas, le fils. Autant de notes distinctes, qui semblent rattachées de manière ténue.
Pourquoi pas, après tout ; le jeu se tient, dans son ensemble. À ce moment, le corps de Resident Evil 7 semble être un amoncellement de greffes d'idées, réalisées par un chirurgien un peu maladroit. La dernière ligne droite viendra cristalliser ce sentiment.
Le bateau, pour ne pas le citer, s'est révélé un très bon passage au final. Il ajuste à la perfection l'immersion du début du jeu avec un level-design assez brillant. Se retrouver, dans un premier temps, désarmé face à des adversaires, dans un environnement plongé dans le noir, procure de sacrées sensations. Pouvoir finauder, ruser, pour ensuite les affronter à armes égales supérieures est assez jouissif.
Néanmoins ce tournant action trouve son écueil dans les mines de sel. À ce moment, le joueur, sentant la fin de l'aventure, exterminera des palanquées de monstres sans la moindre notion de stress. Trop long pour son bien, Resident Evil 7 survit juste grâce à la fin, expédiant le lien avec l'ensemble de la série. Et ce n'est pas Ethan, le protagoniste, qui sauvera l'ensemble.
Il Ethan homme ordinaire qui manie parfaitement les armes
Jusqu'alors, les personnages de Resident Evil ne brillaient pas particulièrement par leur sagesse. Exubérants, très archétypaux, Leon, Claire, Ada, Chris ou encore Wesker semblaient tout droits sortis de séries B. Après tout, les scénarios des jeux précédents semblaient parfaitement adaptés à ces héros.
Le choix d'un personnage inédit, plus terre-à-terre et néophyte en matière de défense et d'armement laissait présager un revirement pour la saga. Que nenni. Ethan se révèlera très vite particulièrement compétent pour manier les armes : tronçonneuse, magnum, fusil à canon scié, lance-grenade ? Aucun souci pour cet homme du commun, pourtant embarqué malgré lui dans une situation précaire.
En outre, son caractère fadasse, ses remarques souvent déplacées et son absence de charisme, par rapport aux autres protagonistes et antagonistes pourront décevoir de nombreux joueurs. La perspective d'un homme ordinaire se débattant pour sauver sa belle, puis lui-même, n'est pas tenu ; à dire vrai, cet espoir déçu va de pair avec la progression du jeu de manière générale.
Le principal ennemi de Biohazard est-il la filiation avec Resident Evil ?
Finalement, à simuler la politique de la terre brûlée, Capcom n'aurait-il pas gagné à distinguer clairement ce septième épisode de la franchise Resident Evil ? En le nommant simplement biohzard, par exemple, et en en faisant un lointain spin-off de la franchise, sans se forcer à reproduire certains écueils liés au combat, à la maîtrise des armes, que l'on pouvait percevoir dans les derniers opus ?
Sous chaque passage de Resident Evil 7, il y a une bonne idée, voire brillante parfois. Des épreuves du fils, Lucas, aux confrontations avec le père, Jack, jusqu'à la fuite en avant face à Marguerite, la mère, ce septième volet renouvelle sans cesse son concept. Le problème ? Tout est enrobé dans un écrin plus orienté vers le combat que l'esquive.
Si Resident Evil 7 avait tout basé sur l'ambiance, en délaissant les monstres de boue notamment, il eût pu devenir un grand jeu, et une référence nouvelle pour la franchise. Quitte à remiser le dernier tiers du jeu (le bateau, brillant par son level-design, et la mine de sel, médiocre en tous points) pour un autre jeu revendiquant clairement l'héritage de la saga.
On reconnaîtra bien des qualités à ce Biohazard / Resident Evil 7. Celle d'être parvenue à renouveler entièrement l'essence de la saga n'en fait pas partie. C'était si proche, pourtant.