Doit-on revenir sur le succès rencontré par les Soulslike et leurs déclinaisons ? Alors que le vent transporte toujours l'odeur du soufre des batailles passées sur Elden Ring, le genre ne se limite pas qu'aux incursions de From Software. De nombreux descendants ont pu prouver leur valeur au combat ; on pense bien évidemment, dans le registre 2D, au superbe Hollow Knight.
Dans un marché déjà bien rempli, Tails of Iron arrive à s'immiscer dans un trou de souris. Séduisant les joueurs par son esthétique très travaillée, le jeu d'Odd Bug Studios peut-il porter les armes jusqu'au panthéon des metroidvania nouvelle génération ?
Oyez, oyez, bonnes gens, l'histoire de Tails of Iron
La souris Redgi est à la fois fortunée et malheureuse. Le fils de la royale lignée était prétendant au trône, laissé libre par son père, Rattus. Il lui fallut, pour cela, battre en duel son frère, Denis. Après une âpre bataille, la foule acclamait le nouvel héritier, avant que l'ennemi historique, le clan des Grenouilles, fasse son apparition et tue l'ancien souverain.
Reprenant conscience, Redgi est donc le roi d'un royaume délabré. Il n'est plus permis d'aller dans les chambres du château, dévastées ; les villageois sont battus et trainés dans la boue par les immondes batraciens, lorsqu'ils ne sont pas fait captifs. Pire : ses frères ont été enlevés. Coûte que coûte, Redgi va donc devoir invoquer la force de feu son père, pour espérer reconquérir son royaume, et la victoire.
Conditions de test
Le jeu Tails of Iron a été utilisé sur PS5, à partir d'une version commerciale présente sur le Playsation Store. Aucun bug particulier n'a été noté, si ce n'est un souci au niveau de l'audio lors du combat final, ayant nécessité la réinitialisation du jeu.
Peut-on trouver son identité dans un trou de souris ?
Le développeur, Odd Bug Studios, est un nouveau venu sur le marché du jeu vidéo. Ayant fait ses armes avec le jeu The Lost Bear, exclusif au PS VR de Sony, le groupe a attendu 2021 et la sortie de Tails of Iron pour se faire un plus grand nom. Leur nouveau titre, décliné sur tous les supports existants de consoles de salon, doit être leur porte d'entrée dans la cour des grands.
Et c'est peu dire que les premiers visuels du jeu aident à son appréhension. Dans une superbe 2D, ils convoquent l'esthétique macabre et microscopique de Hollow Knight, pour la concilier avec le trait des personnages de Darkest Dungeon. En résulte une vitrine graphique de fort belle facture, propre à intriguer sur le jeu qui la permet.
Dès les premières minutes, manette en main, le récit narré par une voix-off rappelle le premier titre d'un studio en pleine explosion : Bastion, de Supergiant Games, ainsi que leurs productions suivantes. Toutefois, les combats, de leur côté, lorgnent plutôt du côté de Dark Souls et son lignage. Combiné au personnage faisant penser à Moss, et aux tendances micro de Hollow Knight, le joueur se retrouve sur un champ de bataille qu'il a déjà l'impression de connaître.
Melting pot d'influence, Tails of Iron ne rechigne jamais à reconnaître ses modèles. En témoigne bon nombre de références plus ou moins adroites, à commencer par une "Station de tram oubliée", ou à des mécaniques de gameplay présentes dès le début du jeu.
Le rongeur du metroidvania
Le genre du Soulslike tel que popularisé de nos jours est essentiellement le fait de From Software. De Demon's Soul à Elden Ring, en passant par Dark Souls, Sekiro, ou Bloodborne, l'éditeur japonais a fait de ce style son fer de lance. Néanmoins, par bien des égards, ces jeux sont souvent l'évolution du metroidvania.
Celui-ci se définit par deux éléments : une vaste carte, dont des passages sont bloqués, et qui implique d'être revisitée à l'aide d'objets idoines ; une composante RPG, pour améliorer les attributs des personnages, ou son équipement.
Tails of Iron : le manuel de combat des soulslike pour les Nuls
Ainsi, Tails of Iron lorgne aussi bien du côté des metroidvania, que des soulslike. Ce dernier aspect est parfaitement représenté par les combats, ardus, et cédant la place à des réflexes et la hardiesse des joueurs. Néanmoins, la difficulté est allègrement allégée, en regard des jeux From Software, ou de leur pendant 2D, Hollow Knight.
Pour les combats, l'accent est mis sur la parade et l'esquive. Et pour cause : deux signaux distincts sont émis lorsque les ennemis s'apprêtent à faire une attaque à esquiver, ou à parer. On est, à ce titre, bien loin de la subtilité d'un Dark Souls, impliquant l'observation précise des mouvements de son opposant pour pouvoir s'en sortir.
Que l'on ne s'y trompe pas, toutefois. Tails of Iron n'est pas extrêmement simple, mais il n'est pas dur, à proprement parler. Les sauvegardes, très régulières, permettent d'assurer les répétitions constantes des joutes, jusqu'à la victoire finale ; les signaux émis sont une garantie de plus de ne pas se faire surprendre par une attaque impromptue.
En résulte cependant un sentiment étrange et contrasté. Si remporter une victoire contre n'importe quel ennemi est satisfaisant, elle n'aura pas demandé au joueur de puiser dans ses compétences. Il s'agit, pour l'essentiel, de répondre aux signaux lorsqu'ils se présentent, après avoir compris ce qu'ils signifiaient pour chaque adversaire.
Le jeu n'est jamais dur, et n'est jamais "injuste" ou frustrant envers le joueur. Tout est là pour lui permettre de traverser, bon an mal an, l'aventure jusqu'au dénouement attendu avec les batraciens. À ce titre, les grenouilles ne sont pas les seuls ennemis à occire, et l'armure à équiper aide à envisager les autres joutes.
Équipement of Iron : l'arsenal essentiel pour l'aventure
Redgi dispose de trois armes à équiper, et de trois protections. Une arme à une main, une arme à deux mains, et une arme à distance, d'une part ; un heaume, une armure, et un bouclier, d'autre part. Chacun de ces objets comporte son lot d'avantages ; néanmoins, il faut prendre garde à la charge d'équipement, qui restreindra, le cas échéant, les mouvements de notre souris.
Toutefois, aucune profondeur supplémentaire ne s'applique à ces armes. Une fois qu'un set-up est trouvé, le joueur n'a aucune raison d'en changer. Il n'y a que de très légères variations, d'un équipement à l'autre. À dire vrai, seul le choix de l'armure pourra être remis en question ; chacune d'entre elles protège mieux contre l'un des quatre types d'adversaires à rencontrer. Il s'en trouve quatre : grenouilles, larves, moustiques, ou taupes.
À cet égard, les taupes ne seront à rencontrer que dans le dernier tiers de l'aventure, et uniquement au sein de quêtes secondaires. On peut par ailleurs s'attarder sur l'un des points les plus marquants du jeu ; il semble se terminer après avoir tout juste commencé.
Les armes et les protections s'obtiennent au gré des recherches dans les environnements, au terme des combats, ou par le biais de quêtes. Un autre aspect prohéminent de Tails of Iron.
Si l'ambition était un fromage, les souris ne seraient plus nourries
La progression, dans Tails of Iron, se distingue en trois phases, pour l'essentiel. Les combats constituent une partie importante du jeu ; néanmoins, l'exploration pour résoudre des quêtes est également prégnante. Par ailleurs, une fois le prologue passé, Redgi aura la possibilité de reconstruire son château.
Reconstruire son château ? Mais c'est génial ! Une petite couche de gestion des ressources, d'organisation de son royaume pour optimiser son château, véritable QG de l'aventure ? Que nenni, malheureusement. La phase de reconstruction passe, là encore, par le moyen des quêtes présentes dans les villes. Celles-ci permettent de récolter de l'argent, et de financer les travaux dans la forteresse des rongeurs.
Et c'est là l'un des maux dont souffre désespérément Tails of Iron ; ce manque de volonté à dépasser son concept initial. Le jeu est un agréable moment, jalonné de combats et d'aventure, mais il est, paradoxalement, à la fois répétitif, et trop court. À peine le prologue fini, lorsque les deux frères de Redgi pouvant forger des armes et cuisiner des plats ont été retrouvés, l'on se trouve déjà à la moitié du jeu.
En dépit de l'aspect quelque peu répétitif de l'ensemble, cette aventure courte décontenance. Et pour cause : certains mystères, comme le passé du défunt suzerain, étaient évoqués, sans trouver résolution. Par ailleurs, malgré l'aspect esthétique chiadé, on ne peut pas dire que les environnements soient très variés.
Finalement, Tails of Iron est en tout point semblable à l'idée de son système de combat. Il s'agit d'une production intimiste, courte, inspirée par les plus grands. Elle constitue une expérience "compacte" de celles-ci, avec toute leur profondeur de gameplay à peine esquissée. Rappelons-le : il s'agit du deuxième jeu d'un jeune studio de développement.
Néanmoins, faudrait-il s'en plaindre ? Tails of Iron se laisse parcourir de fond en comble rapidement, et de manière plaisante. Un beau pied de nez, finalement, aux titres se regorgeant du périmètre de leur carte open-world, et du nombre de quêtes annexes disponibles.